Bonjour à tous,
Conformément à ce que j’avais déclaré dans l’Annonce de Juillet 2022, je viens d’être publié en tant qu’étudiant Student Ex-Machina (SEM), dans la revue « Colloque 2022 – Esprit critique, arts et technosciences » du Groupe de Recherche pour l’Éducation et la Prospective (GREP-MP), association de vulgarisation scientifique toulousaine organisant de nombreuses conférences sur des thématiques très variées : https://grep-mp.org/
Le programme Student Ex-Machina consistait à l’élaboration en 3 mois d’un texte commun sur une thématique de vulgarisation scientifique, dans notre cas l’éducation à l’esprit critique, puis sa restitution critique et originale lors d’un colloque du GREP rassemblant de nombreux spécialistes de la thématique « Esprit Critique, arts et technosciences »
Dans cet article, je republie la partie introductive de notre travail que j’ai rédigé (1), ainsi que ma propre partie (2), dans un souci de concision car nos parties sont indépendantes les unes des autres.
La revue complète est disponible en accès libre en version numérique sur le site du GREP-MP : https://grep-mp.org/boutique/publications/colloques/colloque-2022-esprit-critique-arts-et-technosciences/
Le document est téléchargeable en bas de la page au format pdf sous le nom « Groupe SEM Education. Il est à noter que le présent article contient des modifications, corrections et ajouts qui ne sont pas présents dans la publication originale.
1. Pensée Critique et Esprit Critique : Comment l’éducation doit exercer son rôle critique ?
Pensée Critique ou Esprit Critique ?
La Pensée Critique (traduction littérale de l’anglais critical thinking, rendu plus souvent par
Esprit Critique) est un concept dont les définitions sont nombreuses et parfois
contradictoires. Elle désigne, en général, les capacités et attitudes permettant des
raisonnements rigoureux afin d’atteindre un objectif, ou d’analyser des faits pour formuler un
jugement.^1
En France, sous l’impulsion de l’ouvrage La formation de la pensée critique. Théorie et
pratique^2 de Jacques Boisvert (1999), on distingue les capacités critiques, qui forment la
Pensée Critique, des attitudes critiques, qui forment l’Esprit Critique^3.
L’éducation à l’Esprit Critique est-elle légitime ?
Parce que l’esprit critique est censé reposer sur la liberté et l’autonomie de pensée des individus, l’éducation à l’Esprit Critique, est toujours apparue comme une évidence douteuse, que personne ne remet fondamentalement en question, mais dont on est incessamment incité à contester la légitimité, surtout quand elle nous est défavorable.
Il est aussi courant d’en critiquer les imperfections, pour se déresponsabiliser et/ou se responsabiliser collectivement et juger de l’intelligence, ou bien plus souvent de critiquer la bêtise de la société.
Cette critique permet cependant de comprendre que le concept d’Esprit Critique est disputé entre ceux qui pensent qu’il s’agit d’un ensemble de facultés que devraient posséder les individus, et ceux qui le voient comme le produit d’une institution collective et de la confrontation d’idées dans le débat public.
En effet, la question se pose car, si l’école se contente de transmettre et de sanctionner des savoirs individualisés, dont chacun doit tirer les bénéfices à force de travail et de mérite, alors elle entretien une inégalité des savoirs telle qu’elle peut menacer l’Esprit Critique de la société, perçu comme un système collectif, car ceux qui maîtrisent les codes de l’Esprit Critique peuvent alors dominer ceux qui ne les maîtrisent pas.
On ressent alors une tension de principe, sur la nécessité d’éduquer, de transmettre et d’influencer collectivement, pour construire une pensée individuelle libre, indépendante et autonome.
Plus philosophiquement, il y a une tension entre l’Esprit Critique, en tant que concept général et ensemble d’attitudes auxquelles doit se conformer la pensée rationnelle, et les esprits critiques, qui cherchent à penser librement et différemment les uns des autres.
Ainsi, l’éducation à l’Esprit Critique est déjà un parti pris. Celui que le savoir, sa constitution, sa consolidation et sa transmission, doit être normé par des valeurs et des principes qui sont ceux de la rationalité, qui regroupe l’amour de la vérité et le pragmatisme.
Ainsi, en théorie, cette éducation s’oppose à la croyance a priori, à l’irréalisme, qu’il soit scientifique ou politique, et préférera à la déontologie morale, une éthique rationnelle.
Cependant, le « pragmatisme », « réalisme » ou « rationalisme », bien qu’il s’en défend, bien qu’il s’en défend, est comme toute autre idéologie, càd un ensemble d’idées permettant de penser et de construire une opinion sur une multitude de sujets.
Toute idéologie formule des jugements de valeur fondé sur des visions morales, et sont victimes de leurs propres biais.
Il semble paradoxal qu’une idéologie qui se donner pour mission de combattre, voire de dissoudre, l’ensemble des biais (cognitifs, sociaux, logiques, …) pour faire triompher une vérité toujours plus rationnelle puisse tomber dans cet écueil. Pourtant, la controverse autour de l’éducation à l’Esprit Critique démontre au contraire que, pour une idéologie pour laquelle la raison est comme le nez au milieu d’un visage, son autocritique sur ses propres biais est le préalable le plus vital et nécessaire pour maintenir sa cohérence interne.
Or, de nombreux biais parcourent ces idéologies et en fragilisent les fondements. On peut en citer quelques uns des principaux :
- La fausse dichotomie entre la raison et les émotions
- La croyance en un monde plus heureux et prospère à mesure que la raison individuelle et collective augmente
- La dénégation de toute forme de rationalité dans le domaine politique ou sociale
- Le paradigme libéral selon lequel chacun est individuellement responsable de son « hygiène mentale ».
Par conséquent, en pratique, nous le verrons, l’éducation est elle-même traversée de valeurs contradictoires et régulièrement remises en débat, ce qui va peut-être pour le mieux si notre objectif est la démarche critique et le progrès scientifique.
Ce constat de départ pose plusieurs questions sur l’éducation à l’Esprit Critique :
L’éducation permet-elle le développement de l’Esprit Critique ? Jusqu’à quel point ? Ne faut-il pas au contraire, laisser les humains libres de penser ce qu’ils souhaitent ?
Nous comprenons que l’art du doute que suppose l’Esprit Critique, repose nécessairement sur
des principes rationnels desquels on ne peut pas incessamment douter.
Dans ce cas, quels sont les principes nécessaires au développement de l’Esprit Critique chez
les individus ? Comment leur enseigner ?
Nous le verrons, pour développer une pensée libre et autonome, et pouvoir douter de tout avec
raison, il est nécessaire de se reposer sur des principes dont on est certain, car précisément, c’est par ces principes que l’individu peut éviter les erreurs de raisonnement, et par ce moyen, devenir un citoyen libre et éclairé.
Références
- https://fr.wikipedia.org/wiki/Esprit_critique (Esprit Critique – Wikipédia)
- La formation de la pensée critique. Théorie et pratique de Jacques Boisvert (1999)
- https://cortecs.org/publications-recherche/pensee-critique/ (Pensée critique ? Esprit critique ? Un peu de théorie –
Cortecs) - L’art d’avoir toujours raison, Schopenhauer, 1831
- https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ducation (Education – Wikipédia)
2. La Zététique comme projet d’éducation à
l’Esprit Critique : La rhétorique scientifique au service de l’engagement citoyen ?
Henri Broch qui a repopularisé le terme zététique en France le définit ainsi : La zététique est la
méthode dont on se sert pour pénétrer la raison des choses.
Pour certains, la zététique est un synonyme de la méthode scientifique (hypothético-déductive), à la différence qu’elle est appliquée et enseignée de façon grand public, à toutes sortes de questions qui peuvent nous sembler a priori étrangères à la science.
« La Zététique n’est rien d’autre que la méthode scientifique, mais appliquée à des champs de connaissance soulevant une telle charge affective qu’elle nécessite d’intégrer les impasses intellectuelles et les biais cognitifs relevant de la croyance, de l’adhésion ou de l’engagement. »^1
Le concept de zététique exprime l’idée que le doute s’applique à toute connaissance. Une connaissance porte toujours sur l’observation d’un fait, analysé par une méthode rationnelle. On peut ainsi simplifier en présentant la connaissance comme la combinaison de faits et de raisonnements.
La zététique permet donc de remettre en doute les connaissances, mais pas n’importe quel type de connaissances. Il s’agit, selon un principe, d’écarter les connaissances les moins fiables, celles qui demandent le moins d’effort à être réfutée rationnellement.
La zététique permet donc de remettre en doute les connaissances, mais pas n’importe quel type de connaissances. Il s’agit, selon un principe, d’écarter les connaissances les moins fiables, celles qui demandent le moins d’effort à être réfutée rationnellement.
La zététique permet alors de développer notre méfiance contre les intuitions, les nôtres comme celles des autres (I), surmonter les imperfections de nos sens, de notre cerveau et de notre raison (II), éviter les mauvais jugements et les manipulations logiques (III), et enfin, s’assurer de la fiabilité de nos connaissances (IV).
A-t-on raison de croire ce que l’on croit ? Voilà la question à laquelle la zététique cherche à répondre. Or, tout comme le questionnement des croyances est un phénomène qui traverse la société tout entière, la zététique est un projet collectif, où les scientifiques mutualisent leurs connaissances et leurs raisonnements afin que, par leurs efforts, on puisse écarter toujours davantage les mauvaises connaissances.
Faire progresser la connaissance par la réfutation, c’est-à-dire l’art du doute, semble être la plus pertinente afin d’éviter, de la même façon que « la mauvaise monnaie chasse la bonne »^2, que la mauvaise connaissance chasse la vérité.
Ainsi au 21ème siècle, la zététique (ou « skepticism » en anglais ou « zetetikos » en grec ancien) ne définit pas seulement l’art et la science du doute, qui recherche la connaissance, mais un projet d’éducation à la science et à la pensée critique bien plus large.
En effet, plus que la zététique comme principe, ce sont bien les zététiciens, de plus en plus nombreux et influents, qui portent un projet d’éducation à l’Esprit Critique qui se veux de plus ambitieux.
Ses figures les plus connues, Christophe Michel de l’Observatoire zététique^3, Thomas Durand de la Tronche en biais^4, donnent des conférences régulières sur l’esprit critique partout en France, et produisent un nombre conséquent de vidéos de vulgarisation scientifique sur YouTube.
Gérald Bronner, sociologue, tout aussi médiatique et plus influent, a été le directeur de la commission interministérielle qui a produit un rapport intitulé « Les lumières à l’ère numérique », faisant un état des lieux de la propagation des fakes news dans l’espace médiatique, et les solutions permettant de lutter contre leur propagation. Son ouvrage Apocalypse cognitive, publié en 2021, donne une vision d’ensemble de sa vision de la zététique, qui, il est bon de le souligner, n’est pas partagée par tous, qu’ils se revendiquent zététiciens ou non.
La véritable force de la zététique est la déconstruction méthodique et exhaustive des connaissances.
C’est pourquoi le cas d’école le plus simple et le plus utilisé en zététique, elle a déconstruction rationnelle des phénomènes surnaturels, car par définition, il s’agit des sujets les plus éloignés de la réalité matérielle, et sont faciles à déconstruire étant donné l’absence totale de preuves, ce qui permet aussi d’analyser les discours et les justifications qui peuvent amener à croire que de tels phénomènes existent. Plus généralement elles illustrent notre tendance à la fascination et à l’affabulation surtout ce qui nous paraît étrange voire magique.
En particulier, le célèbre Défi Zététique lancé dans les 1970s vise à mettre les gens à l’épreuve de démontrer qu’ils possèdent des pouvoirs surnaturels, avec la promesse d’une grosse somme d’argent en cas de succès (personne n’y est encore parvenu).
D’autres exemples sont fréquemment utilisés : comme la déconstruction des pseudo-sciences, pour mieux expliquer ce qu’est la science ; le complotisme et la désinformation, pour mieux expliquer ce qu’est un complot et une information fiable.
Plus fondamentalement, les zététiciens font des colporteurs de ces discours irrationnels et souvent manipulatoires leurs ennemis. Les zététiciens soulignent notamment que, alors même que ces colporteurs s’intéressent à des sujets aussi variés que la santé, l’astronomie et la politique, ils utilisent pourtant une rhétorique commune pour défendre ces différentes croyances irrationnelles, dans laquelle ils ne peuvent appuyer leur démonstration uniquement par des raisonnements fallacieux et des faits inventés, càd des discours anti-science.
Ainsi la fonction originelle de la zététique est de distinguer l’imaginaire du réel.
Elle pose donc la question suivante : Comment distinguer une connaissance (du réel) d’une
croyance (imaginaire) ?
Il s’agit déconstruire la pensée magique, et s’opposer vigoureusement au relativisme des opinions, que l’on peut résumer par la maxime : À chacun sa croyance à chacun sa science.
En effet, cette suspension totale du jugement, est intenable rationnellement, car la réalité s’impose en dépit de la diversité des croyances qui existent à un moment donné. Ce qui est vrai l’est même quand on n’y croit pas.^5
Finalement, la méthode zététique est une méthode scientifique qui insiste sur la recherche
systématique de l’erreur. Sa démarche se produit en 3 étapes essentielles :
- On croit en quelque chose
- On vérifie si on a raison d’y croire par un test de réalité
- Si on parvient à démontrer que la croyance est vraie ou fausse, on produit une nouvelle connaissance.
De même, les prestidigitateurs (magiciens) sont donc de bons zététiciens lorsqu’ils sont des illusionnistes honnêtes. Le Gorafi, média d’information parodique qui suit la même logique : Détourner pour mieux détromper. Ils exploitent les défaillantes de nos sens et de notre raison pour mieux les révéler.
Cependant, bien que la raison soit souvent mise en avant par les zététiciens, leur travail vient surtout interroger des faits. Car si on parvient à prouver l’inexistence ou l’inexactitude d’un fait, aucun raisonnement ne saurait réfuter cette réfutation par les faits.
Selon le précepte de Fontenelle, « Assurons-nous du fait avant de nous inquiéter de la cause ».
Cela signifie que, dans biens des cas, les zététiciens ne sont pas aussi « cartésiens » qu’on pourrait le penser, car Le Discours de la méthode de Descartes, n’avait que faire des faits, car il considérait que nos sens sont trompeurs, et que seul le raisonnement logique permettait de produire une connaissance fiable, et dont la première, « Cogito ergo sum » (je pense donc je suis).
Au contraire, les zététiciens sont bien davantage, dans de nombreux cas, des empiristes, pour qui
l’observation et l’expérience sont reines en science. Selon eux, il faut mythe selon lequel l’homme est capable de raison pure.
La plupart ont intégré la critique du « cartésianisme » de Descartes, qui avait lui-même une logique bornée et limitée par son manque de connaissances sur les sujets sociaux, et dont la croyance inébranlable en Dieu, comme un absolu impossible en question, altérait son jugement.
Les zététiciens partent alors du principe, et avec raison, que Descartes avait en réalité beaucoup plus de certitudes que le zététicien moderne, alors même qu’il prétendait ne juger que par la raison et le doute.
En effet, l’erreur fondamentale de Descartes, était qu’il ne jurait QUE par la logique. Or, les faits empiriques sont tout aussi important. Tel est le postulat des zététiciens, mais qui devrait plus largement être celui de tout scientifique.
Il reste cependant chez les zététiciens un reste de cartésianisme. Ils sont en effet les premiers à considérer qu’acquérir la connaissance par la raison pure est vain. Mais ils sont tout aussi prompts à construire des certitudes factuelles et empiriques, car leurs certitudes reposeraient sur de bonnes raisons de douter. Si les zététiciens cherchent plus ou moins à relativiser cet absolu, et évitent de prétendre que la zététique permette de résoudre tous les problèmes rationnels, et de d’accéder à tous les types de connaissances véritables, ils ne cherchent pas moins à élargir sans cesse le champ scientifique auquel la zététique peut s’appliquer.
Leur arrivée plus récente, mais tout aussi productive, dans le champ des sciences sociales, non sans maladresse dans un cercle zététique où la plupart des zététiciens viennent du monde des sciences physiques et naturelles, en est une parfaite illustration.
La zététique, bien qu’elle reconnaisse que les mots soient tout ce que l’on ait pour penser correctement, reconnaissant par là même le rôle de la rhétorique dans la construction et la déconstruction des raisonnements, mais aussi des manipulations fallacieuses, se retrouve dans une impasse lorsqu’un raisonnement humain, décuplée par la force sociale du nombre, devient une réalité tangible avec laquelle il faille compter, et même que les raisonnements peuvent modifier les comportements humains à tel point que la réalité des faits finit par être totalement transformée.
Bien entendu, pour faire face, la zététique n’est pas dépourvue d’outils. Ils peuvent par exemple démontrer à quel point tous les hommes sont faillibles. Leurs actions et raisonnements sont conditionnés par de nombreux « biais cognitifs », notre attention et notre mémoire nous font souvent défaut pour raisonner pleinement, et notre cerveau à une fâcheuse tendance à combler les failles de raisonnement pour rechercher la vraisemblance et la cohérence avec ses propres
intuitions, plus qu’avec la réalité des faits. Mais une telle position les oblige à reconnaître leur propre imperfection, sans quoi leur arrogance à détenir la voix de la vérité sera de même nature que celle de Descartes en son temps.
Pour être à la hauteur de ces enjeux, la zététique possède un dernier atour dans sa manche, probablement le plus important : Le sens de la remise en question collective.
Les zététiciens mettent à l’honneur l’ouverture d’esprit, qui consiste à accueillir avec bienveillance les preuves, qu’elle qu’elles soit. Tout ce qu’ils demandent en échange, c’est l’acceptation d’un principe empirique que nul ne peut contester : L’absence de preuve n’est jamais la preuve de l’absence, mais elle est suffisante jusqu’à preuve du contraire.
Cette exigence est tout à fait légitime, car elle permet d’avancer dans la compréhension de la
connaissance malgré les doutes qui peuvent demeurer.
Ainsi, le seul moyen d’éviter la « fracture du crâne », c’est-à-dire l’acceptation de toutes les opinions quelles qu’elles soient, au nom de l’ouverture d’esprit, est de poser un principe rationnel absolu : Dans une situation où on est parvenu à décréter l’absence de preuve, suspendre son jugement est une faute rationnelle, et même, à court-terme, douter est une faute rationnelle.
Mais pour pouvoir décréter un tel absolu, il est nécessaire que la chose ne soit pas démontrée seulement par une personne ou une poignée de personnes, aussi compétentes soient-elles, mais par la multitude la plus grande d’humains de bonne volonté et de bonne méthode, malgré la diversité des champs et des méthodes scientifiques, et en prenant en compte la force des faits sociaux-politiques auquel la science en tant que réalité ne peut pas échapper.
Il s’agit donc, alors même qu’un pilier de la stratégie pédagogique des zététiciens, est d’enseigner à se méfier des charlatans, et plus fondamentalement des idées qu’ils véhiculent, qu’ils soient capables de faire confiance aux gens qui pensent différemment d’eux, accepter la critique et même faire régulièrement leur auto-critique, et donc ne pas considérer la zététique comme un principe absolu qui ne saut être changé, amélioré.
Il s’agit, en somme, de faire passer le message qu’il faut se méfier des gens qui nous disent de nous méfier des gens. C’est seulement ainsi que la batailles des idées et des mots pourra se jouer sur le terrain de la raison, et non des guerres de personnes et d’opinions. Mais cela nécessite, dans une certaine mesure, de faire confiance à l’intelligence de son public, et d’éviter une verticalisation trop importante du rapport enseignant/enseigné, au risque que les apprentis-zététiciens finissent par changer de gourou.
C’est notamment le seul moyen pour lutter contre un absolu bien plus néfaste : l’hyper-criticisme ou la méthode hyper-critique, qui consiste à douter de tout systématiquement, inlassablement, de tout critiquer sans distinction, de ne jamais se satisfaire de rien, et de juger qu’aucune connaissance n’est fiable. Si en principe, la science sceptique raisonne ainsi, considérer que toutes les connaissances se valent, fait nécessairement le jeu des connaissances les moins fiables.^6
Et c’est pourquoi, pour accomplir une authentique éducation à l’Esprit Critique, il ne suffit plus à enseigner doctement les principes de la pensée critique, mais il faut aussi instiller et inspirer le goût, le désir et la volonté de s’auto-éduquer, et de fournir les moyens de le faire.
Références
- « Pour une didactique de l’esprit critique », Richard Monvoisin (2007).
- Loi de Gresham (https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_Gresham)
- L’Observatoire zététique (http://zetetique.fr/) qui produit la chaîne Youtube « Hygiène Mentale »
(https://www.youtube.com/channel/UCMFcMhePnH4onVHt2-ItPZw) - La Menace Théoriste (https://menace-theoriste.fr/zetetique/) qui produit la chaîne Youtube « La
Tronche en biais » (https://www.youtube.com/user/troncheenbiais) - « Facts don’t care about your feelings » – Ben Shapiro (qui était pourtant un conservateur américain
membre du Parti Républicain) - Pour en apprendre plus, voir la vidéo de la Méthode Hyper-critique sur la chaîne de la Tronche en
Biais (https://youtu.be/fCUIlQcZ8tU)